Jean me
racontait récemment ce qui lui était arrivé dans son entreprise, une PME d’une
centaine de personnes.
Le
contexte dans lequel elle évolue est particulièrement difficile, mais à force
de travail, d’évolution et de rigueur, elle réussit à faire face. Après
plusieurs années très tendues, elle respire beaucoup mieux :
les carnets de commande se gonflent, les clients sont satisfaits, les
engagements respectés, l’augmentation du CA est soutenu. Et pour faire face à
cet accroissement d’activité, des embauches sont prévus.
Pas de
bol, il y a quelques semaines, le Directeur des ressources humaines, en poste
depuis longtemps, annonce son départ. Il veut réaliser un projet qui lui tient
à cœur depuis longtemps : faire pousser des chèvres sur le pont du Gard.
Dans quelques semaines il sera parti.
Impossible
de se passer d’un DRH ! Il faut de toute urgence le remplacer.
Jean me
confiait attendre avec curiosité l’arrivée du nouveau DRH …. Quelle tête
aura-t-il ? Sera-t-il plus souple que l’ancien ? Chevelu ou
chauve ? A moins que pour une fois, l’entreprise ait la bonne idée
d’embaucher une femme à ce poste ! Ça changerait un peu dans cet univers à
90% masculin.
Jean
travaille comme chef comptable dans cette entreprise depuis de nombreuses
années. Son truc à lui, c’est les chiffres, les tableaux, les bilans, les
comptes clients, les factures, etc. Son travail de comptable lui plait, il le
maîtrise très bien et il donne entière satisfaction à sa direction. Sa
synthèse d’entretien d’évaluation et la prime annuelle en attestent. En
revanche, les paies – à part la sienne –, les contrats de travail, la
réglementation du travail, le recrutement, la formation professionnelle, les
accords –ou désaccords- avec les syndicats… bref, le job d’un DRH…sont
bien loin de son monde.
Moins
loin qu’il ne pouvait l’imaginer car, il y a quelques jours, son
Directeur Général lui a annoncé, avec ce qu’il faut de solennité, qui était
promu. Il le nommait …roulement de tambour : Directeur des ressources humaines.
J’ai bien
senti dans sa voix, lorsqu’il me racontait cette histoire, un mélange
d’incompréhension, d’inquiétude et de panique : « Je suis comptable
moi ! Qu’est-ce que j’y connais en ressources humaines ? Rien !
Comment je vais faire ! J’suis mort ! Et ma nouvelle équipe
avec !»
Étonnant,
non ? Pour paraphraser Pierre Desproges.
Et vous
avez raison, cette petite anecdote est tout droit sortie de ma cervelle en
ébullition.
Et
heureusement ! Personne n’aurait l’idée de nommer quelqu’un à un
poste stratégique sans s’assurer d’au moins deux choses : son envie
de remplir cette mission et les compétences minimums pour
assumer et assurer le job.
Et
pourtant … Et pourtant !
Mon
expérience auprès de nombreuses entreprises, m’a fait rencontrer de nombreux managers qui, non seulement n’avaient
pas choisi de l’être, mais, surtout, n’avait jamais était formé à ce métier.
Et
pourtant, il avait été nommé manager comme mon chef comptable fictif avait été
nommé DRH.
Dans une
grande surface, un employé libre-service exemplaire que l’on nomme chef de
rayon pour remplacer Monsieur Raymond qui part à la retraite.
Dans une
PME, un comptable expérimenté que l’on nomme chef de service pour encadrer les
trois nouveaux comptables fraîchement embauchés suite à une croissance
exponentielle.
Ce
commercial itinérant que l’on nomme chef des ventes, comme une évidence au vu
de ses résultats commerciaux explosifs.
Ce mode
de nomination nous amène à nous poser la question : manager est-il
vraiment un métier ou ne serait-ce qu’une responsabilité secondaire –
parmi tant d’autres – que l’on confie « à la one
again » aux collaborateurs les plus automnes et les plus impliqués. Parfois même comme une assurance anti-démission ou une décoration
honorifique ?
C’est
vrai quoi, finalement, en gros, en résumé et pour être synthétique : il
suffit de vérifier que le travail est bien fait, que les problèmes bloquant
sont résolus, que les choses tournent à peu près normalement.
Pour
répondre à cette question – manager est-il un métier ? –, je vous invite
à examiner votre propre expérience de
managé : Tous les managers qui vous ont encadré se valent-ils ?
Certains ont-ils été motivants, impliquants … et d’autres
ont-ils parfois réussi à vous décourager par leur attitudes, à vous donner
envie de changer de navire, quitte à prendre le risque d’une traversée à la
nage sans beaucoup de visibilité quant au prochain navire accueillant ?
(traduction en français courant : envie de vous casser)
Avez-vous
en mémoire un manager qui vous ait marqué ? Un manager qui vous donnait
envie de vous lever le matin, que vous aviez du plaisir à voir, qui savait mêler une forte exigence qui fait grandir et une
reconnaissance de vos efforts, vos progrès, vos résultats, un manager dans le
regard duquel vous vous sentiez plus fort, plus respecté ? Un manager qui
savait gérer une erreur pour ce qu’elle est…une erreur…et non pas pour ce
qu’elle n’est pas : une faute, un sabotage…Un manager capable d’organiser
son temps pour en donner individuellement et collectivement assez à chacun de
ses collaborateurs…Un manager observateur, capable de discerner dans des
ruptures habituelles de comportements positifs, les premiers signe d’une
démotivation, un manager suffisamment délicat pour vous en parler sans vous
vexer, sans vous mettre mal à l’aise, sans vous
blesser. Un manager qui lorsque vous partiez en vrille savait vous recadrer,
seul à seul, droit dans les yeux, en 20 secondes…et ne plus en reparler…
Quels
étaient vos résultats avec ce manager ? Et les résultats de
l’équipe ? Et l’ambiance dans l’équipe ?
Et si
vous n’avez pas eu la chance de croiser ce genre de manager, repensez à votre
scolarité : Nous avons tous connus au moins un professeur qui savait mêler
l’exigence et la reconnaissance … et nous ne sommes pas prêts de
l’oublier. Cette matière si ingrate était devenue, avec lui, passionnante et
nos résultats meilleurs que jamais.
Le
recroiser aujourd’hui encore, dix, vingt, quarante ans après, est
vécu comme un moment de bonheur, une madeleine de …………*
Oui,
définitivement, manager est un métier. Bien fait,
il provoque des choses étonnantes : Implication, résultats, plaisir, bien
vivre au travail …
Et pour
bien le faire, il faut des connaissances, des compétences précises, des
savoir-faire, du discernement … comme dans n’importe quel métier !
Et
vous qu’en pensez-vous ?
A dans
quinze jours
* Rajouter à
la place des points votre prénom, autrement il faudra la rendre à
Proust
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